mardi 22 novembre 2016

Le vrai vainqueur des primaires

La connaissance des principes démocratiques a beau
sembler des plus sommaires, la plupart des événements
politiques en occident ne cessent de donner raison à sa
terrible vision du monde
J'ai suivi les débats de la primaire de la droite et du centre avec attention, voire passion, un peu comme on suit les matchs de foot à la télé quand son équipe favorite n'est pas impliquée. J'avais décidé dès le départ de ne pas y participer et de laisser la droite choisir son champion. Pour autant, je savais que le choix du vainqueur ne serait pas sans conséquence sur l'avenir du scrutin, pour la gauche comme pour la France et même pour le monde... parce que la France, ça n'est pas rien.
C'est vrai aussi que je ne pensais qu'à une chose : me débarrasser de Sarkozy et de ce qu'il représentait, son manque d'envergure, ses liens douteux et le fait qu'on avait de forts soupçons sur le fait que s'il envisageait de poursuivre la politique c'était dans le souci très personnel d'éviter de s'expliquer devant la justice. 
L'individu a réduit l'action politique à ce qu'elle a de pire. Je n'ai pensé, comme beaucoup de Français, qu'à une chose : l'empêcher d'avoir quelque poids que ce soit dans l'évolution de mon destin individuel et politique.
Cela n'avait rien à voir avec Fillon, qui semblait très à l'aise en troisième position, ex-aequo avec Bruno Le Maire, dont, c'est vrai, je souhaitais le déclassement, à cause de son incohérence et de la façon dont il avait phagocyté la droite euroise. 
Quand Fillon a commencé à monter dans les sondages, j'étais plutôt content sans trop comprendre pourquoi. Il installait Bruno Le Maire derrière lui. Quand j'ai vu qu'il montait encore plus, je me suis mis à espérer sans trop y croire qu'il pourrait dépasser Nicolas Sarkozy. 
En allumant la télé dimanche soir, tous mes pronostics se sont retrouvés immanquablement balayés par le raz-de-marée Fillon. 
Le phénomène ne laisse pas d'être inquiétant, et j'en parlerai plus tard. Je ne voudrais pas cependant éviter de relever quelques sujets de satisfaction essentiels.

1) un taux de participation exceptionnel

Plus de 4 millions de personnes ont décidé de payer deux euros pour choisir leur candidat. Cela dit assez l'intérêt des français pour le système démocratique et pour le débat politique, quoi qu'on ait pu en entendre dernièrement.

2) La défaite sans appel de Nicolas Sarkozy

Je n'irais pas jusqu'à me réjouir de voir l'individu humilié, mais il y a de la satisfaction dans l'humiliation de quelqu'un qui a été incapable de voir les signes du profond rejet de ce qu'il représentait à savoir de quelqu'un prêt à tout pour son ambition personnelle, trichant sans arrêt dans ses discours et réduit à assimiler sa stratégie politique à celle de l'agression permanente et d'un rejet de l'autre de façon à masquer son absence de projet.

3) Le score ridicule de Bruno Le Maire

Bruno Le Maire se rêvait au moins troisième homme et figure incontournable de l'avenir de la droite. Il est distancé par les trois premiers et se fait doubler sur le poteau par Nathalie Koshusko Morizet, arrivant avec peine à dépasser Frédéric Poisson, le chouchou de Christine Boutin. Ce résultat n'est pas sans incidence pour la carrière de l'individu qui n'a pas compris qu'une primaire n'était pas la continuation d'un combat interne au sein d'un parti politique. Rappelons qu'il avait fait un peu plus de 30 % des voix face à Sarkozy, sauf qu'il avait réalisé ce score grâce à l'appui de ceux qui le distancent aujourd'hui : Fillon et Juppé. 
Ce score n'est pas sans incidence non plus sur la situation de la droite dans l'Eure où il risque d'avoir fort à faire pour garder son autorité. On verra si Priollaud, son indéfectible soutien, saura éviter d'être considéré comme quantité négligeable et se retrouver éjecté de la course au primaire par ceux qui auraient choisi un meilleur cheval. Le Maire a fait un mauvais score partout même s'il a approché les 10 % dans l'Eure. C'est beaucoup plus que les 6% qu'il a fait péniblement à Louviers où Fillon que personne ne soutenait est arrivé largement en tête. Pas de quoi pavoiser pour Priollaud.

Reste la victoire de Fillon

Elle m'inquiète pour trois raisons. 
La première, c'est que l'individu, raide comme un piquet ne prête pas à la sympathie. Si cela ne touchait que moi, cela serait sans conséquence. Sauf que Fillon risque d'avoir à affronter Marine  Le Pen et là, ça risque d'être une toute autre paire de manche. On me rétorquera que Fillon a gagné la primaire. Pas à mon sens. Selon moi, c'est Sarkozy qui par son entêtement a fait gagner la primaire à Fillon. Ce sont les attaques menées contre le centre Juppéiste qui ont profité à Fillon, et non à Sarkozy lui même, trop déconsidéré pour en tirer quoi que ce soit. Fillon n'est pas un bon candidat. 
La deuxième c'est que Fillon représente la droite dure et va avoir à cœur de se venger de ce qu'il n'a pas pu faire sous Sarkozy. Son projet n'est pas à même de répondre aux enjeux de notre monde en pleine évolution, ni sur le plan social, ni sur le plan sociétal. 
La troisième c'est que Fillon ne cache pas ses sympathies pro-russes. C'est abominable, parce que, pour la première fois depuis longtemps, la défense des droits de l'homme ne sera pas la colonne vertébrale de la France dans son action politique internationale. C'est abominable, parce que se mettre sous la coupe des complices des massacreurs et de ceux qui se préparent à reprendre l'Ukraine ne signifie rien de bon, après que le Brexit, la reprise en main dictatoriale de la Turquie, la victoire de Trump et l'affaiblissement de l'Europe à laquelle Fillon ne croit pas, risque de participer d'un terrible retour en arrière de l'humanité. 
Le pire n'est jamais sûr, mais ça fait froid dans le dos.

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