lundi 3 juillet 2017

Indispensables radicaux





Les radicaux, comme les socialistes, comme tous les partis politiques français ont traversé une déflagration sans précédent dans la vie politique française. Dans notre république, dans nos partis qui la fondent, plus rien ne sera comme avant. 
Bientôt, le comité directeur du parti radical de gauche aura à débattre de son présent, de son passé, de son avenir. 
Le café radical, qui a toujours prôné le débat comme essence même de l'identité radicale et républicaine, reproduit ici un texte qui lancera les débats. Il y est question bien entendu du rapprochement avec les radicaux valoisiens qui demandent à nous rejoindre, mais la question est bien entendu bien plus vaste. Il ne s'agit pas de reproduire à petite échelle les centre-gauche et centre-droit, ce que Macron a fait bien mieux que nous. Il s'agit bien plutôt de promouvoir ce dont la république aura toujours besoin et dont les radicaux sont porteurs : la créativité allié au réalisme politique, l'attachement farouche à la laïcité comme seul mode de résister aux conformismes conservateurs pour promouvoir la capacité de faire vivre ensemble tous les hommes, la promotion des valeurs républicaines indépassables de liberté, d'égalité et de fraternité, sur lesquels tous les nouveaux droits doivent s'asseoir, sur lesquels doivent se greffer les nécessités écologiques d'adaptation du monde à un environnement fini. Le radicalisme a un passé remarquable. Il a un avenir qui ne l'est pas moins. Ci-dessous le texte co-signé par des dirigeants radicaux. Le débat est lancé. 

Appel pour une formation progressiste au service de la République, du pacte social et de l’Europe fédérale.


De l’utilité politique du radicalisme au 21ème siècle


Ce texte posé comme une base de discussion, porte l'ambition de proposer une voie d'action nouvelle pour notre parti afin qu’il s’inscrive pleinement et rapidement  dans un  contexte politique singulier qui présente plus d'opportunités que d'obstacles au succès de ses  idées et au déploiement de son organisation.
Nous sommes les enfants de Georges Clemenceau, de Cécile Brunschvicg, de Léon Gambetta, d’Edouard Herriot, de Jean Zay ou de Michel Crépeau. Nous sommes les radicaux. Depuis 1972 nous sommes les radicaux de gauche.
La République, c'est les radicaux
D’illustres références en victoires politiques majeures, notre fierté s’appelle laïcité, impôt progressif, droit des femmes à disposer de leur corps et de leur maternité, droit de mourir dans la dignité, écologie responsable, progrès économique au service du progrès social.
Notre histoire est notre ferment, notre socle. Elle nous lie, nous oblige et  nous rassemble.
Pour autant, aussi forte et engageante soit-elle, cette histoire ne peut aliéner l’esprit créateur et audacieux des radicaux. La force de nos pères ne fût pas de s’ériger en  gardien d’un temple mais de le bâtir. Le radicalisme est avant tout un état d’esprit, une flamme républicaine et progressiste allumée dans les tourments d’un monde en mutation où les repères changent et parfois s’estompent voire disparaissent.
Nous sommes un parti politique, pas un musée, pas une faculté d’histoire ou de théologie. Ni combat des modernes face aux anciens, ni débat de puristes ne doivent se substituer à notre devoir d’agir dans une démocratie plus que jamais en quête d’un projet collectif garant  d’améliorations concrètes et porteur d’un espoir de justice, de liberté, d’égalité, de fraternité et de progrès partagés.  
Tirer les leçons du passé est notre devoir pour projeter le radicalisme dans le 21ème siècle.
La séquence présidentielle et législative que nous venons de vivre,
Belle citation, qui situe bien que notre culture politique n'est
pas celle de Macron
aussi courte fut-elle, marque un bouleversement profond et probablement pérenne de la pratique politique et institutionnelle de notre pays. Notre parti n’en sort pas indemne.
Nous ne méconnaissons rien des débats et affrontements de ligne et de stratégie qui ont traversé le PRG comme l’ensemble de la classe politique française. Chacun défendra sa part de vérité. Notre famille s’est trouvée écartelée entre proximité idéologique avec le projet porté par Emmanuel MACRON, cohérence politique au regard de son engagement sous le mandat HOLLANDE, préférence pour une logique de coalition respectueuse des identités, refus d’une dissolution dans un ensemble nouveau. 
Les Hommes sont libres, pas les organisations collectives. Chez les radicaux plus qu’ailleurs cela fait sens. Chacun, individuellement, aura donc pu, sans crainte, défendre ses convictions, défendre ce qu’il croyait être l’intérêt du radicalisme. Cette séquence aura, nous le savons, été difficile pour tous et ne peut satisfaire personne. Toutes les blessures ne sont pas refermées et les incompréhensions encore nombreuses. 
   
Pourtant nous avons survécu et conservé, même affaiblies, une autonomie et une indépendance. Ce n’était pas écrit. Pour y parvenir, de nombreux radicaux, faisant fi de leurs désaccords passés, sont partis ensemble au combat législatif sous nos couleurs pour que le radicalisme soit encore en question aujourd’hui. Par l’implication majeure des jeunes radicaux de gauche, une nouvelle génération s’est imposée, nous offrant ainsi une sérénité pour l’avenir. 
Photo reprise par l'extrême droite ... eh oui ! Nos ennemis
dessinent notre visage.
Grâce à tous ceux qui ont eu le courage de privilégier la survie de notre parti, nous avons en effet réussi à dépasser l'obligation légale de présenter plus de 50 candidats réalisant plus de 1% des voix au premier tour des législatives et respectant la parité. Cette condition était le préalable absolu à toute autre considération si nous voulions que notre organisation ne disparaisse pas purement et simplement du paysage politique. Dans le contexte impossible de cette élection, cette détermination radicale était vitale et doit être chaleureusement et respectueusement saluée. Elle nous oblige.
Nous devons ensemble écrire une nouvelle page du radicalisme plutôt que son oraison. Il y a urgence.
L’immobilisme de la pensée et de l’action comme la paralysie des débats internes nous condamnent à la disparition.
Comme chacun, nous déplorons amèrement aujourd’hui l’absence d’un groupe radical indépendant à  l’Assemblée nationale. Ensemble nous en avions pourtant les moyens. Le nouveau monde politique n’a, de ce point de vue, rien à envier à l’ancien. Nous voulons croire que cette situation n’est que temporaire et que, demain, chacun saura trouver  la force et l’envie de se retrouver et les mots pour le faire. Notre parti pourra à nouveau être fier de voir sa singularité portée en tant que telle au sein la représentation nationale. Notre parti doit se renforcer de son unité. Nous sommes persuadés que les radicaux ont encore un long chemin commun à parcourir et qu'ils doivent être au cœur d'un groupe singulier à l'Assemblée nationale.
La situation politique nouvelle nous interdit de nous perdre en psychodrames internes au risque de valider nous-même notre inutilité politique.
Le radicalisme a survécu. Il doit désormais se réinventer loin de toutes les hégémonies et au regard des nouveaux clivages politiques. 
Nous ne renions rien de notre passé au sein de la gauche depuis François MITTERRAND. Nous ne renions rien des accords de majorité passés avec le Parti socialiste d’hier. Nous ne sommes pas parlementaires ou ministres. Nous avons comme chacun porté les accords et stratégies au nom de l’intérêt collectif, de la perpétuation de notre idéologie. Nous avons toujours été fiers du travail accompli par chacun de nos représentants.
Chacun aura néanmoins mesuré les travers, les erreurs parfois, de ces alliances et la situation de domination toujours, que nous avons collectivement acceptée.
Il nous faut aujourd’hui admettre que l’agitation et la défense des victoires d’hier ne sera jamais une réponse en soi aux enjeux d’aujourd’hui et de demain. Il nous faut agir, reconstruire.

Nous sommes des progressistes.   
Notre sens des responsabilités, de l’engagement et de la cohérence idéologique nous poussent aujourd’hui à accompagner le projet présidentiel, à lui apporter notre plus-value radicale. Refuser l’opposition de principe, participer à la conduite de la France au nom de nos valeurs est et a toujours été notre honneur.
Pour autant, reproduire avec La République en Marche les mêmes méthodes qu’avec le Parti Socialiste, serait commettre une erreur. Une association à la majorité présidentielle suppose d’asseoir et de justifier pour le PRG un statut de partenaire respecté et en situation d’apporter une plus-value singulière utile à la réussite de la France.  
A ce titre, nous considérons que la principale leçon à retenir de cette époque politique, est l’exigence d’indépendance que nous nous devons pour porter nous-même notre projet devant les Français à l’avenir.
C’est l’enjeu de notre utilité politique qui nous est posé aujourd’hui.
Porter la création d’un nouveau mouvement indépendant fondé sur la cohérence et nos valeurs est notre avenir.
Nous ne pensons pas que gauche et droite se valent pas plus que nous ne croyons à la disparition définitive des clivages. Nous constatons néanmoins sans regret qu’ils ont bougé, se sont étiolés parfois, se sont recomposés surtout face aux enjeux de la mondialisation, de la construction européenne et des nouveaux comportements humains. Nous l’avions souhaité.
L’enjeu n’est plus de s’inscrire dans une référence historique pour inventer l’avenir mais bien de créer une offre politique nouvelle fidèle à notre histoire, pour être utile  à notre pays.
De cet espace nouveau, nous permettrons une réorganisation politique capable d’offrir à la France une démocratie pluraliste et vivante qui n’enferme pas le débat entre un grand parti central et les extrêmes. Nous avons suffisamment lutté contre le bipartisme caricatural de la Vème République pour ne pas imaginer que l’ensemble du champ républicain soit accaparé par une seule formation politique.
L’enjeu aujourd’hui c’est la cohérence du projet que nous devons bâtir et de celles et ceux qui devront le conduire. Cette cohérence ce n’est pas celle d’un socialisme enfermé dans ses utopies et la contestation aujourd’hui. Le projet de  Benoit HAMON était respectable, il n’est pas pour autant le nôtre. S’ils ont des rêves, la tête dans les étoiles, les radicaux ont aussi les pieds sur terre. Nous ne pouvons enfermer le radicalisme dans un rôle de porte-voix d’un socialisme qui cherche encore et toujours à définir ce que sera la sienne.
Notre projet doit être rassembleur. Il doit s’adresser aux responsables politiques qui assument un rôle de gestion du pays, un sens de la réforme et partagent sincèrement un socle de valeurs audible et crédible pour les Français.
C’est le sens de l’accord que nous avons passé avec Génération écologie puis récemment l’avec l’Union des Démocrates et Ecologistes avec lesquels nous souhaitons réciproquement pouvoir approfondir les possibilités d’un rassemblement.
C’est aussi le sens  qui doit être donné à  la démarche de réunification avec les radicaux valoisiens. Ce projet n’est pas technique, pas plus qu’il n’est une fin en soi. Il ne s’agit pas là de confire le radicalisme dans un entre soi poussiéreux mais bien de jeter les bases d’une plateforme progressiste cohérente. Il devra se fonder sur des bases claires intégrant l’indépendance effective des radicaux valoisiens de toute autre formation politique. Sa traduction dans les collectivités territoriales ne pourra intervenir immédiatement afin de prendre le temps d’une véritable construction politique. Les discussions d’ores et déjà bien avancées au Sénat permettront sans nul doute d’être un premier jalon tangible de cette réunification.
C'est enfin ce que nous devrons offrir à tous les progressistes, aux "divers gauche" sans appartenance partisane, aux milliers d'élus locaux - ruraux notamment - qui cherchent une maison reconnaissante de leur engagement et de leur mérite. C’est ce que nous devons proposer aux (ex)socialistes qui demandent à exprimer leurs convictions dans un ensemble cohérent.
Si ce projet devra être débattu, faire l’objet de travaux de fond, d’échanges idéologiques avant d’être validé par l’ensemble des adhérents, il devra surtout être attaché à rassembler largement sur une base claire.
Rassembler sur un engagement républicain et laïque exigeant offrant à chaque citoyen une liberté absolue de conscience avérée et respectée plutôt qu’un modèle anglo-saxon multicultuel  propice à un apartheid culturel et social bien éloigné de notre tradition du vivre-ensemble.
Rassembler sur un attachement à la décentralisation, à la défense de l’égalité des territoires, à la ruralité qui ne peut se satisfaire de voir les collectivités territoriales revenues sous la coupe du ministre de l’Intérieur au détriment d’une politique de cohésion territoriale dont nous savons mieux que personne qu’elle sera menée avec force.
Rassembler sur le renforcement du pacte social, sur une liberté économique au service de la création de richesse, de la redistribution, d’une solidarité érigée comme corolaire des réussites individuelles.
Rassembler sur une écologie responsable, une redéfinition des circuits économiques et la création de nouveaux métiers au service d’une société de progrès.
Rassembler sur le renforcement des libertés individuelles gages d’une adhésion de chacun au destin collectif de la nation.
Rassembler sur une Europe fédérale, 1ère puissance mondiale, capable de protéger, de répondre aux enjeux climatiques, économiques ou sociaux, au devoir humanitaire que ne peut résumer à elle seule  une politique migratoire, au devoir de développement des pays en souffrance, à l’impératif de paix.
Ce socle cohérent, les radicaux le portent en eux. Leur réunification pourrait le renforcer et le mettre en lumière. Ce serait surtout la promesse que l’on peut rassembler les femmes et les hommes sur une idéologie humaniste, progressiste, solidaire, libérale et protectrice en laissant le soin aux historiens de déterminer demain si elle fut de la gauche ou de la droite en vigueur en 2017.
Ce nouveau mouvement devra enfin se choisir un nom en phase avec son temps. Si le radicalisme est notre fierté, sa modernisation est notre devoir.
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Ce projet, nous l’avons mûri en maintenant le dialogue avec toutes les forces de progrès. Il  ne sera viable que s’il est enrichi, s’il permet de nous réunir à nouveau, s’il est porté demain par une grande majorité d’entre nous. Ce projet ne nous appartient pas et n’en faisons pas revendication. Il est le fruit des échanges que nous entretenons depuis des mois avec toutes les sensibilités du parti.
Ce projet est un appel résolu à l'action car le PRG peut et doit, sous la seule réserve qu'il se mette en mouvement, prendre une place importante dans la reconstruction d'un progressisme éclairé et responsable. Il pourrait trouver à se décliner lors des élections sénatoriales à venir.
Il ne s’agit pas là de faire une  synthèse, un aggiornamento ou une motion de la direction ou d’un camp. Il s’agit seulement d’une expression de notre attachement déterminé au devenir du radicalisme. Nous savons que cette volonté est partagée par tous.  Elle ne trouvera pas à se réaliser dans l’immobilisme ou l’aigreur mais dans l’élan que nous pourrons créer collectivement. Ce choix nous appartient.


Guillaume LACROIX, Bernard CASTAGNEDE, Patrick MOLINOZ, Mélanie FORTIER, Eddie AÏT, Jean-Bernard BROS, Frédérique PLAISANT, Paul DHAILLE, Frédéric NAUD... 
Pour ma part, je suis prêt à signer ...