jeudi 27 novembre 2014

Orient, l'occident en quête d'horreur

A l'Ouest, rien de nouveau ?

Maxime Hauchard, de Bosc-Roger-en Roumois, est devenu le dernier bourreau français. Voilà qui en a laissé plus d'un sans voix, dont moi-même. Comment expliquer une telle monstruosité et comment admettre, parfois, les pires horreurs que j'ai parfois entendu à droite à gauche. Pour faire bref, j'ai entendu dire "avec ce qui se passe en Syrie, faut comprendre ..." . J'avais beau me tourner la tête dans tous les sens, je ne comprenais pas pourquoi il n'y avait eu personne pour défendre les démocrates qui ont enclenché la révolte en Syrie contre Bachar el Assad et qu'on se retrouvait 3 ans plus tard à justifier le comportement de gosses devenus des monstres en s'engageant aux cotés des intégristes.
Quelques temps avant, je venais de lire un ouvrage étonnant :  l'histoire des 3 Adolf, un manga politique de l'auteur japonais Osamu Tezuka. 

Un concours de circonstances
fait qu'Adolf, élevé au Japon,
ayant suivi une formation dans
les jeunesses hitlériennes, est
appelé lors du premier crime
qu'il doit perpétuer sur quelqu'un
qu'il connait très bien.
Cet ouvrage a ceci d'intéressant qu'il montre l'Europe de la deuxième guerre mondiale vue du Japon. En peu de temps et en quelques images, des personnages a priori sympathiques deviennent  des monstres définitifs, modelés par les circonstances. Le phénomène est bien entendu renforcé lorsque les personnages sont des jeunes gens, des fragiles en quête de certitudes. Pas étonnant que j'ai pensé à cette bande dessinée lorsque, comme tout le monde, fracassé par l'horreur de la révélation de l'identité du bourreau islamiste, j'ai voulu me raccrocher à quelque chose. À quelque chose qui pourrait m'aider à m'expliquer. 


C'est le boulanger de son village,
père de son meilleur copain,
dont il a juré qu'il le défendrait
toujours.
Or donc, c'est l'Europe vue par un Japonais et c'est particulièrement insoutenable pour nous parce que les personnages qui commettent l'horreur, l'irréparable, nous sont sympathiques. Exactement comme un jeune homme d'une petite commune de l'Eure, éduqué dans un milieu ouvert, catholique non-pratiquant, actif dans la commune, un jeune homme comme tout le monde nous est a priori sympathique. 


Juste après, juste après avoir
commis son premier crime, le
jeune héros assassine une jeune
et jolie femme sans défense.
Alors, comment quelqu'un qu'on aurait aimé avoir comme copain d'école a-t-il pu devenir un monstre, quelqu'un capable d'égorger de sang-froid, de le revendiquer et de se montrer au monde entier ?
Le rite d'initiation permet
juste l'accès à l'inhumain. On
a bien changé le statut d'un
jeune adolescent, mais c'était
juste pour transformer un
jeune homme bien élevé
en brute monstrueuse.
Olivier Roy a donné une explication ce matin sur France inter. Sa réponse comporte une bonne part de cynisme, notamment lorsqu'il dit qu'il vaut mieux laisser partir les jeunes gens commettre leur crime à l'extérieur. Il cite l'exemple du Canada où l'interdiction de partir s'est traduite par la commission d'attentats à Montréal. Il n'y a, selon lui, rien de neuf sous le soleil. Les jeunes qui se sont embrigadés derrière les maoïstes, les guevaristes, les trotskystes n'étaient que le reflet du besoin d'action et d'engagement de la jeunesse. Ils ont suivi en cela l'exemple de ceux qui, des croisades aux brigades internationales en passant par les engagements romantiques nationalistes au dix-neuvième siècle, de ceux qui sont partis effectivement, j'en ai connu qui en Israël, ou aux côté de peuples en quête de reconnaissance et de liberté se sont jetés en pâture au grand Léviathan géopolitique de l'Histoire. Ca s'est passé au Moyen Orient, en Afghanistan et ça allait de par le vaste monde. Qu'on se rassure dit Olivier Roy, les bandes du Daech n'ont même pas l'ambition qu'avait Al Qaida de dominer le monde et le débarrasser à tout jamais des chrétiens ou des infidèles ...
Alors, à l'Ouest, rien de nouveau ? C'est que la jeunesse, en temps de paix, reste toujours  fascinée par la guerre . Les ados sont souvent les premiers engagés lors des conflits dont le monde est couvert ... et bien sur, tous ceux qui ont intérêt à la guette sont prêts à en tirer le plus grand profit.
Nos enfants sont trop intelligents pour l'ignorer. Bien sur, ils n'entendent que ce qu'ils ont envie d'entendre. Les arguments de la raison glissent sur les impératifs du désir et du besoin de se construire d'une jeunesse en quête d'elle-même.