mardi 10 juin 2014

TERRITOIRES : FAUT IL UN REFERENDUM ?

A priori, ça ressemble à n'importe quoi... et a posteriori, ça laisse perplexe. On a beau savoir que les territoires n'existent pas de toute éternité, que la France et son mille-feuille administratif sont appelés à être réformés, on n'y retrouve pas ses petits, d'autant que le territoire, compte pour beaucoup dans la construction de notre identité collective et individuelle.

La carte des diocèses de l'église
catholique de France s'est parfaitement
adaptée aux départements créés par la 
Révolution française.
C'est même drôle au fond de s'imaginer que les départements ont un peu plus de deux siècles, créés ex abrupto par la Révolution Française, se sont imposés et ont été adoptés partout.
Les départements ont pris une nouvelle vigueur en 1982, avec les lois de décentralisation, qui leur ont permis de trouver une certaine autonomie. Rappelons-le, il s'agissait alors d'instituer une relation nouvelle entre le citoyen et ses territoires. 30 après, on en est encore là, et, disons-le, ça n'a pas si mal marché. Tout le monde, à droite comme à gauche, s'est accommodé des textes, à partir du moment où l'action locale y avait un sens et où le pouvoir y était réel.
Ainsi les villes, les départements, les régions sont-ils passés de droite à gauche, puis de gauche à droite, balayant des conservatismes, favorisant les créativités, développant l'écoute des forces vives des territoires.
Mais alors, me direz-vous, pourquoi changer tout cela, puisque ça convient à tout le monde et que ça ne marche pas si mal.
Pourquoi le Président Hollande, après Nicolas Sarkozy, insistent ils si lourdement à vouloir transformer les Régions, supprimer les départements, et s'y prennent-ils si maladroitement ?

Passé le choc, il convient de réécouter l'intervention d'André Vallini et d'Hervé Le Bras, respectivement ministre et géographe, sur France Inter le 3 juin 2014... Nous avons un début de piste, mais ce n'est pas vraiment satisfaisant.
André Vallini est convaincu dans une première partie, mais a du mal, dans la seconde à répondre aux questions simples d'Hervé Le Bras et de Patrick Cohen... et donne finalement le seul exemple territorial qui vaille : la création de la Normandie réunifiée. Nous n'allons pas nous en plaindre, nous en avons déjà parlé ... et d'ailleurs, la seule crainte que nous puissions avoir, c'est que cette réforme, si mal ficelée, connaisse le même sort que la réforme Sarkozy ... et qu'il en faille recommencer à redécouper les territoires une prochaine fois.
Parce qu'enfin, ça reste étrange. Même si l'insistance de gouvernements de couleur politique opposée à réformer nos territoires est manifeste, on est abasourdi par l'incohérence des projets.
Au fond, le seul argument récurent d'André Vallini, homme éminemment respectable (mais si peu convaincant parce qu'au fond, on sent qu'il n'est pas convaincu), c'est de dire que les Régions coutent trop cher.

Carte des Régions revisitées par le gouvernement Valls, et
présentées par Libération. On a du mal à percevoir la pertinence
économique, sociale ou historique du redécoupage.
 
Pour tout dire, c'est un argument lamentable. On croirait entendre du Sarkozy ! Ce n'est pas qu'il faille renoncer à mieux gérer les régions, bien sur ... mais on ne fonde pas un projet de réorganisation administrative, juste pour faire des économies ... ou alors, alors oui ... mais on dit franchement les choses.
Le cas du redécoupage du territoire, de cette série d'occasions loupées démontre  que notre constitution est peu adaptée à la réforme. On avait voulu un quinquennat pour faire en sorte que le Président ne soit pas un être hybride, flottant au dessus du parlement, le dissolvant à sa guise, et seul maître du temps politique. On se rend compte qu'en fait, on est dans une situation d'affaiblissement du pouvoir. Sarkozy, comme Hollande ne peuvent se faire élire sur une révision générale de l'organisation du territoire. Ils peuvent peut-être perdre une élection là-dessus, mais pas la gagner ! C'est sans doute la raison pour laquelle, chez Hollande, comme chez Sarkozy, la question n'est venue qu'au bout de deux ans de pouvoir, c'est à dire, sous la pression électorale qui arrive très vite dans un quinquennat. Ainsi, la réforme la plus ambitieuse devient-elle la plus bancale et la plus mal bricolée.
On le voit déjà, le bricolage  institutionnel nous mène droit à la catastrophe. Réécoutez ce que Vallini dit sur la Bretagne : on a choisi de ne pas toucher aux Régions existantes... Pourquoi ? Pour avoir des éléments de langage, visiblement. Ce choix ne se justifie pas. Si les régions ne sont pas pertinentes, il fallait les redessiner finement et surtout ne pas brider les choix.
Un autre aspect de la carte. Mais il ne faut pas s'y tromper,
si la réorganisation des régions doit impliquer des changements
majeurs, il s'agit d'un aspect mineur d'une réforme de bien plus
grande envergure. Les départements et les communes seront
remises à terme en question. Sans doute Est-ce une réforme
nécessaire, mais elle concerne tous le français, bien au-delà
d'un attachement identitaire aux divers territoires.
On dit : la démocratie coûte cher. On doit remettre en cause l'équilibre des territoires et leur gestion. On doit remettre en cause la proximité du citoyen et de l'élu. Alors, oui, mais là on remet en cause une question du rapport entre le citoyen et sa représentation locale et nationale, on remet en cause la décentralisation. Alors, on n'est plus dans un simple arrangement technique. On est dans une nécessité politique. Alors, moi qui m'y oppose généralement, là je dis : oui, il faut un débat national. Il faut un référendum.



 
 



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