lundi 18 avril 2011

Un article de la Repubblica !




En attendant les commentaires... un article sur les récents événements survenus sur la frontière Italiennes ... lieu prisé par les touristes qui n'ont parfois, pour les Français que cette seule vision de l'Italie que la ville frontière de Vintimille, vouée au commerce, quand les touristes Italiens se contentent de Menton. Cette fois, ils ont été pris par l'Histoire et même les touristes n'ont pas pu aller en France ... l'Italie et la France règlent leur comptes sur le dos des immigrés... dans une même incapacité à affronter la réalité de la situation. Ça s'appelle le populisme.


Un article donc de Bernardo Valli, paru dans la Repubblica de ce jour, lundi 18 avril.



France et Italie, les deux populismes


de BERNARDO VALLI




Depuis quelques semaines, deux populismes s’affrontent en Europe, offrant un spectacle qui est tout sauf édifiant. Je dirais misérable. L’adjectif n’est pas trop fort, parce qu’au centre de la polémique, il y a ces réfugiés, économiques et politiques, la classification étant souvent effacée par le drame humain qui, chaque jour s’échoue sur nos rives après avoir vu se noyer dans les eaux Méditerranéennes, bien plus qu’occasionnellement, les enfants, les parents, et les amis. Dans ces mêmes eaux dans lesquelles nous, européens, nous commencerons bientôt à nous livrer aux baignades estivales.


Le Président du Conseil a défini cet ’exode comme un tsunami, c’est à dire une catastrophe naturelle, mûri dans les viscères de la Méditerranée, et donc sans visage. En somme un malheur à conjurer. La France et l’Italie se comportent exactement comme si ces réfugiés étaient l’onde d’un tremblement de terre.


La tension entre les deux populismes à atteint des tons grotesques ces dernières heures à Vintimille, à la frontière entre la France et l’Italie, où, d’habitude, transitent d’heureux touristes, ou pratiquants de la navette entre la Cote d’Azur et la Riviera, et ont fait irruptions des groupes de ces réfugiés réduits par la traversée souvent tragique de la Méditerranée. Le gouvernement Italien les a doté de permis provisoires à son avis conformes aux accords de Schengen. Mais le gouvernement parisien, par le biais du Préfet des Alpes Maritimes, a interdit sans préavis aux trains en provenance d’Italie de traverser la frontière afin d’empêcher leur entrée en France.


Deux comportements qui offrent, à part égale, un image certes peu noble de l’Europe. Ce n’est pas pour motif humanitaire que le gouvernement italien a doté les immigrants, en majorité tunisiens, de permis que les Français n’ont pas retenu valides, à tort ou à raison. Il s’agit d’une manœuvre évidente et malicieuse pour s’en débarrasser. Et pour que toute autant malicieuse manoeuvre que le préfet des Alpes Maritimes, obéissant à son Ministre de l’Intérieur, a adopté l’interprétation parisienne des accords de Schengen, ou a pris comme prétexte la modeste manifestation franco-italienne en faveur des migrants en cours à Vintimille pour repousser les Tunisiens, dont beaucoup ont de la famille en France.


Du coté italien, on s’est aussi demandé pourquoi d’authentiques citoyens de la République italienne n’ont pas pu franchir la frontière par la voie des trains interdits… Au comble de l’indignation, le ministre des affaires étrangères, Franco Frattini, a demandé à notre ambassadeur d’exprimer un ferme protestation au gouvernement français. Un incident diplomatique produit par la confrontation de deux manœuvres mesquines qui interviennent à un moment de rapports difficiles entre Paris et Rome et aussi d’isolement de Rome dans l’Union Européenne, où l’on évite toute manifestation de sympathie avec l’odieuse politique italienne.


Une vague croissante de populisme frappe la France et l’Italie au moment même où s’ouvre leur désaccord. A Rome le gouvernement dépend d’un parti xénophobe, indispensable à la majorité parlementaire et fait diligence à alimenter les sentiments contre les immigrés. Un dirigent de la Ligue, occupe, de fait le ministère de l’Intérieur.


A Paris, à un an des élections présidentielles, Nicolas Sarkozy connais ses pires sondages. Le dernier monte un taux de satisfaction de 28 %, un quotient qui pourrait préfigurer un impossible renouvellement à la tête de la 5e République, au cas au Nicolas Sarkozy se représenterait. Et, dans ce cas, n’exclurait pas une humiliante élimination au premier tour. Dans cette dernière hypothèse, il pourrait s’avérer que la candidate du Front National, Marine Le Pen aille au vote décisif du second tour face au champion de la gauche, encore à désigner. Nicolas Sarkozy cherche donc à récupérer les votes d’extrême droite. Ceux-ci ont permis sa réélection il y a environ quatre ans, mais selon les sondages, ont été réabsorbés entre temps par le Front National, depuis que la fille de Jean-Marie Le Pen, son fondateur, a rénové, modernisé, le discours de son désormais vieux père. A la différence de la Ligue, xénophobe, mais aussi anti-nationale, le Front National est xénophobe et nationaliste. Toutefois les deux partis ont en commun l’aversion pour les immigrés. Et c’est en insistant sur ce thème, tout en restant dans les limites imposées par sa charge, que Nicolas Sarkozy espère récupérer le consensus perdu. Son discours est directement adressé à l’extrême droite. Le rejet des réfugiés déroutés vers la France par le gouvernement Italien est l’évidente conséquence de la politique actuelle de Sarkozy. Ce n’est pas un hasard si le ministre français de l’intérieur vient juste de proposer la réduction du nombre des immigrés légaux.


Ainsi, les deux populismes jouent avec les migrants comme s’ils étaient une calamité, comme s’ils étaient des objets destinés à faire perdre des voix. La Ligue gouverne à Rome et le Front National menace le président à Paris. Umberto Bossi (le président de la Ligue du Nord-Note du traducteur) appuie l’idée ridicule de boycotter Champagne et Camembert, et le Préfet des Alpes Maritimes, obéissant aux ordres supérieurs, arrête les trains italiens à la frontière.

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