lundi 6 septembre 2010

Un discours remarquable





Nous aurons l'occasion de revenir sur l'université d'été du prg à Seignosse... et en particulier sur ce qui fait tourner le nez à beaucoup ... c'est à dire le projet d'une candidature Tapie à la présidentielle.



Soulignons au passage la prouesse de communication de Jean Michel Baylet. Grâce à lui, et à l'instrumentalisation de cette candidature, la presse a enfin parlé du parti radical de gauche ... ce qui a rarement été le cas lors des précédentes universités.



Soyons simples et clairs, comme l'a été le président sur un sujet acrobatique.



Quelle est la position du parti radical de gauche sur les présidentielles ?

Si la gauche veut les gagner, elle doit permettre l'expression de chacun en son sein et c'est pourquoi elle défend l'organisation de primaires au sein de la gauche. C'est aussi la manière d'éviter un 21 avril bis ... dont nous ne sommes pas à l'abri.

Maintenant que faire si le parti socialiste conçoit juste l'organisation des primaires comme un débat interne visant à départager les différents leaders socialistes sans laisser le débat ouvert à toute la gauche ?

C'est simple. Nous ne pouvons rentrer dans ce jeu là. Il faut présenter une candidature !

Mais c'est un pis-aller. Le but est bien de pousser le PS a organiser des primaires dignes de ce non. Or de quel poids dispose le prg pour que le projet d'une candidature pousse le PS à organiser des primaires ? Seule la candidature de Bernard Tapie peut avoir cette force.

Curieux paradoxe parce que, en cas de primaires, le nom de Bernard Tapie ne sera jamais proposé.
Voilà pourquoi Jean-Michel Baylet en fin tacticien a martelé à la presse de toute sa force cette éventualité. Sujet d'autant plus facile que ledit Bernard n'était pas à Seignosse. Le prétexte est à mourir de rire. Bernard Tapie n'était pas là parce qu'il venait de perdre son toutou.

Certes cet épisode montre le poids limité de notre parti dans le débat... Mais l'essentiel n'est pas là... D'ailleurs, la stratégie du parti est remarquablement exprimée dans le discours de clôture de ces université d'été. Un discours remarquable une fois le nom de Bernard Tapie n'a qu'à peine été prononcé... Tant il est vrai qu'il n'est quand même pas attendu comme le messie...

Ci dessous, le discours ..



Mes très chers amis radicaux


... Commençons, si vous le voulez bien puisque vous savez où vont toujours mes préoccupations, par la situation internationale.

Pendant que nous parlons -aucun sujet, bien sûr, n’est méprisable- d’élections cantonales ou de querelles fédérales, de Martine Aubry et de Bernard Tapie, une partie diplomatique capitale se déroule à Washington, même si les 63 dernières années ne nous ont pas donné beaucoup de motifs d’optimisme.

J’ai dit qu’il fallait donner à la France, au sein d’une Europe unie, une voix audible dans les relations internationales. Fort bien, mais qu’y peuvent les radicaux ? Vous pensez peut-être que ces questions nous dépassent. Et bien non !

Chacun peut voir que le nœud du problème posé au Moyen-Orient est le défaut de laïcité. Chacun sait aussi, quoi que nous en pensions par ailleurs, que ces problèmes sont actuellement insolubles car la ville symbole de toutes ces haines enchevêtrées, je veux dire Jérusalem, est sacrée pour toutes les religions dites du livre. Pour les radicaux, la laïcité n’est pas une pensée de combat anti-religieux ; c’est au contraire la garantie de la neutralité publique pour tous les choix de conscience. Et je propose (l’a-t-on déjà imaginé ?) un statut d’extra-territorialité pour Jérusalem qui serait administrée par l’ONU, d’une part pour garantir les libertés de chacun et, d’autre part pour montrer que cette ville appartient à notre histoire commune, au patrimoine de l’humanité.



Si l’on veut bien se rapprocher de nos frontières européennes, je crois de la même façon que la France et l’Allemagne auraient beaucoup fait avancer la construction de l’Europe fédérale et lui auraient donné une capitale incontestée si, renonçant à leurs souverainetés nationales respectives, elles avaient constitué un district européen Strasbourg-Kehl qui serait à l’Europe ce que Washington D.C. est aux Etats-Unis fédérés.



Ces deux exemples, mais je pourrais les multiplier, ne sont avancés que pour vous montrer, si vous en doutiez, que la philosophie politique des radicaux trouve et trouvera longtemps à s’employer de façon utile. Ayons l’humilité que nos forces actuelles nous imposent mais gardons la plus grande fierté de nos idées.

Je vous ai dit aussi que l’identité républicaine valait mieux que le lamentable débat xénophobe, discriminatoire, bêtement électoraliste dans lequel la droite avait voulu enfermer ce qu’elle appelle l’identité nationale. Voilà dix mois, en Comité Directeur, j’avais demandé à Jean-François Hory, aidé de tous les radicaux que le sujet passionne, de réfléchir à une définition actuelle et radicale de l’identité républicaine.

Mais la droite s’est tellement enlisée dans ce débat tronqué, elle a tellement fait le lit électoral de l’extrême-droite, elle avait si évidemment l’intention de nous enfermer dans ses postulats, elle donnait de notre pays une image si lamentable, que je n’ai pas souhaité l’aider, même très indirectement, à sortir de cette impasse en réalimentant le débat par le haut. Quand la nationalité dépend, selon l’impayable Madame Morano, du sens de la casquette, aller lui parler de Miranda, de Garibaldi ou de Renan c’est littéralement donner de la confiture à des cochons. Pour autant nous n’avons pas renoncé à exprimer, dans un contexte différent, ce qu’est l’idée élevée, l’exigence permanente qu’ont les radicaux de l’identité républicaine. Et j’ai décidé de vous adresser, avec Jean-François, dans un délai d’un mois, un document livré à vos amendements, à votre liberté de pensée, document organisé autour de cinq idées principales :

  • L’histoire de notre pays n’est pas qu’une mémoire et n’est pas une nostalgie. C’est une communauté de références sans cesse réalimentée. Ce n’est pas « le grand Cimetière » de Barrès. C’est le creuset de toutes nos explications pour l’avenir.


  • La France n’est pas qu’un territoire et, en aucun cas, il ne sera fermé. La France du Siècle des Lumières ne s’est pas arrêtée avec ce siècle-là. Elle a encore, et plus que jamais, à porter le message de l’universalisme et de la fraternité.


  • Devant l’Histoire, la France est comptable de la liberté et elle se doit, en tant que telle, de donner un exemple irréprochable. Nous ne voulons pas d’une France querelleuse, batailleuse, matraqueuse. Nous sommes d’une France généreuse, ouverte et ambitieuse.


  • La France a inventé la laïcité. A mille lieues des discours de Latran, de Dakar ou de Grenoble, notre pays doit porter le message de la tolérance active qui est l’exact contraire du plus petit dénominateur commun entre les ethnies, les religions, les factions, les communautés.


  • La République, enfin, est un projet toujours inachevé. Elle ne se confond pas avec une forme de gouvernement qui n’est-ce n’est certes pas rien que la démocratie. Elle est la quête exigeante et constante d’un avenir commun où chaque citoyen trouverait sa place, sa liberté et toutes ses responsabilités.
    Car je vous ai dit encore que nous devrions trouver, inventer un nouvel équilibre entre liberté et responsabilité. Comment mieux illustrer que par les problèmes de financement de notre Sécurité sociale, et singulièrement celui des retraites, l’impasse où nous a conduits un système déresponsabilisant pour les citoyens ? Pour les radicaux, le solidarisme n’est pas l’institution de droits de tirage sur la collectivité au profit d’usagers que le matérialisme et le consumérisme ont précipité dans l’individualisme le plus irresponsable.


Nous devons traiter sans angélisme et sans violence des questions que la gauche feint d’ignorer parce qu’elles sont dérangeantes pour tous les dogmes :

  • oui, il existe un lien entre la démission de certaines cellules familiales et la révolte d’une partie de la jeunesse contre toutes les institutions détentrices de ce que j’appellerai l’autorité légitime. On ne peut pas parler, au moins si l’on respecte l’individu libre, responsable et solidaire, seulement de déterminismes économiques et sociaux quand des adolescents mettent le feu à des écoles ou à des dispensaires.


  • oui, il existe une crise d’identité liée non pas à l’immigration elle-même mais à la situation incertaine des générations qui en sont issues. Lisez le rôle d’audience de n’importe quel tribunal correctionnel et cessez de vous aveugler. Bien sûr, les problèmes nés des ghettos suburbains n’appellent pas que la répression. La difficulté n’est pas dans l’origine (maghrébine ou africaine) de la dernière vague d’immigration, elle est dans son caractère massif et dans la faillite de toutes les politiques publiques, de gauche comme de droite, qui n’ont pas su proposer les nouvelles voies de l’identité républicaine à une jeunesse écartelée entre deux désespoirs, celui d’une tradition souvent familiale qu’elle récuse et celui de la rue, des bandes, de la délinquance dont on l’accuse.


  • oui encore notre système de solidarité doit être profondément réformé. Oui, par exemple, la sacro-sainte répartition comme seule légitimité de notre système de retraites a vécu. Elle était efficace à la libération dans d’autres conditions économiques et démographiques. Elle est vouée aujourd’hui à l’échec et le lien exclusif entre travail-cotisations-prestations n’est plus pertinent et ne sert plus que les syndicats, ouvriers et patronaux, qui le cogèrent dans la plus grande opacité. Je reviens, pour ma part, sur une proposition souvent avancée par les radicaux et qui a le grand défaut de prendre à rebrousse-poil tous les catéchismes sociaux. Le financement des retraites ne sera possible demain que si nous pouvons concevoir un système à trois étages. Financé par l’impôt, un étage de sécurité égal au SMIC. Financé par la répartition, un étage de solidarité jusqu’à 2,5 ou 2,8 fois le SMIC. Et financé par l’assurance, un étage de responsabilité pour toutes les retraites situées au-delà et qui n’ont, selon moi, aucun rapport avec l’impératif de solidarité.


Ce ne sont que trois exemples de sujets pour lesquels la gauche devra bien sortir de ses dogmes intangibles si elle veut redevenir crédible et retrouver la confiance du pays par d’autres voies que celles, mécaniques et négatives, du rejet d’un pouvoir chaque jour plus détestable.



C’est, en tout cas, autour de nos propositions sur l’identité républicaine, sur le rôle nouveau des services publics et sur cet équilibre difficile à trouver que je prolongerai, en votre nom, les discussions entamées avec nos partenaires pour montrer aux Français qu’il ne sont pas condamnés à subir un pouvoir dont toutes les actions sont aussi contraires à l’image de la France.

Sur ce dernier point, j’ai à peine besoin d’insister tant vos délibérations ont produit depuis avant-hier un constat unanime : la droite n’est pas digne du pouvoir qu’elle exerce.



J’en prendrai quatre exemples.

Le premier est emprunté à une célébrité du moment, de l’instant, vedette de l’été mais pas pour beaucoup plus longtemps. Je veux parler d’Eric Woerth. Oh ! rassurez-vous, je ne reviendrai pas sur les péripéties policières et bientôt judiciaires que lui valent, soyons justes, les fonctions bien délicates d’argentier du parti de l’argent et des puissants. Je veux seulement évoquer le discours qu’il tenait en remettant à un descendant direct de Joseph de Maistre, théoricien de la réaction, une Légion d’Honneur très controversée. M. Woerth déclarait à peu près : « Ma conception de la République, c’est la réconciliation entre l’Ancien Régime et la Révolution… Et vous incarnez cette réconciliation. » Non, Monsieur Woerth, la République n’a rien à voir avec cette impossible union. La République est fille de la Révolution. La République a aboli les privilèges que vous tentez de rétablir. La République, c’est la liberté pour tous, c’est l’égalité des droits, c’est l’école publique, c’est le service public, c’est le respect du bien public. Non, M. Woerth, sur notre drapeau le blanc n’est pas celui des rois de France, le rouge n’est pas celui du sang des communards que M. Thiers faisait couler et le bleu n’est pas celui du sang des aristocrates que vous protégez. Notre drapeau tricolore signifie simplement : liberté, égalité, fraternité.

Trois autres exemples dans trois autres discours que j’évoquais hier, des discours énoncés, j’allais dire proférés, par le Président de la République lui-même.

A Latran, tout d’abord. Voulant s’attirer les faveurs on disait autrefois les indulgences de Monsieur Ratzinger, Nicolas Sarkozy ose dire en notre nom que la France s’est construite dans un équilibre entre les figures tutélaires de l’instituteur et du curé. Le micro-climat italien lui aura-t-il inspiré cette mauvaise caricature d’un dialogue entre Peppone et don Camillo ? La laïcité, selon M. Sarkozy, serait l’équilibre entre la religion qui capte les consciences et l’école qui les libère. On n’a pas le droit de parler ainsi de la France qui vit sur le modèle exemplaire de la séparation des églises et de l’Etat. La République de Ledru-Rollin, de Gambetta, de Combes, de Waldeck-Rousseau, de Clemenceau ne se tient pas à égale distance de l’école et de la sacristie, de l’instruction et du goupillon.



M. Sarkozy s’en-va-t-il à Dakar ? C’est pour y déplorer que « l’homme africain hésite à entrer dans l’Histoire » !... A Dakar, entre une visite à Kadhafi et un saut chez le défunt Omar Bongo. A Dakar, chez Blaise Ndiagne, chez Abdou Diouf, chez Léopold Sedar Senghor. A l’Université de Dakar comme si l’insulte était d’autant plus assurée que l’audience était plus élevée. Par de tels propos, Nicolas Sarkozy renie ce qui est au cœur même de notre conception de l’universalisme, c’est-à-dire la croyance irréductible en l’unité fondamentale de la condition humaine. Il ouvre le chemin de tous les relativismes. Il fait le lit de tous les communautarismes. Il renie le plus beau de l’histoire commune entre la France et l’Afrique, cette longue histoire d’épreuves partagées qui nous impose, pour demain, une communauté de destins.



Et puis, il me faut bien parler du trop fameux discours de Grenoble. Voilà donc un Président de la République, partagé entre la panique des affaires, l’échec économique et social et les soucis de pure et vaine tactique électorale, un président ne présidant plus rien que son caprice, qui ose déclarer la guerre à propos de la délinquance. Et il le dit bien fort, il s’agit d’une « guerre nationale » alors même qu’il est en train de proclamer la guerre civile. Car l’instant d’après il désigne l’ennemi : l’insécurité serait, d’après lui, le symptôme de l’échec de notre politique d’immigration d’où il déduit, ce que Le Pen n’avait pas encore osé, que la répression de la délinquance devrait s’accompagner de la déchéance de la nationalité. Que les voyous ayant depuis longtemps pignon sur rue dans les Hauts-de-Seine, que les voleurs en col blanc qui sont de surcroît protégés par le bouclier fiscal ne s’inquiètent pas. M. Sarkozy ne les vise pas. C’est Mohamed et Boubakar qu’il faut déchoir, chasser, expulser, expurger de la nation pour la rendre plus pure. Dans ce qui n’est, je l’espère, qu’un très mauvais calcul électoral, M. Sarkozy oublie les leçons de l’Histoire et surtout ses leçons les plus tragiques. Le XIXème et le XXème siècles européens ont été mis à feu et à sang par cette conception de la nationalité fondée sur la race, la religion, le territoire, la langue. A l’opposé de cette vision, la France a proposé une idée, la plus simple et la plus belle : une nation est formée des volontés librement assemblées et tendues vers un avenir commun. Menacer une seule personne de lui retirer sa nationalité à raison de son origine c’est s’attaquer au principe vertébral de l’identité républicaine.


Je n’ai cité que ces quatre exemples de l’illégitimité dont est désormais frappée la droite dans l’exercice du pouvoir. J’avais évoqué hier d’autres exemples de son échec patent. Lors de nos débats, vous les avez approfondis et vous en avez abordé beaucoup d’autres. Inutile donc d’y insister : il est urgent, il est de salubrité républicaine de proposer d’autres voies au pays.



Je dis bien salubrité car ce qui me frappe le plus dans cette façon de gouverner c’est la volonté délibérée, assumée, théorisée de dresser des catégories de Français contre les autres. Les Français qui travaillent, qui entreprennent et ceux qui se complaisent dans l’inactivité. Comme si on était chômeur par plaisir et surtout comme si les seconds volaient l’argent des premiers lorsqu’ils perçoivent leurs indemnités. En vérité, il s’agit de leur argent puisqu’ils ont cotisé et que ces cotisations, dont il faudra bien repenser le principe, constituent le plus injuste des impôts.



Et on oppose encore les Français soucieux de leur droit à la retraite dès 60 ans à tous les autres, ces Français dignes d’estime car ils sont tellement à l’aise dans leurs privilèges, dans leur satisfaction de nantis qu’ils n’envisagent pas, eux, de s’arrêter d’en profiter. Eh bien moi, je dis à M. Sarkozy, protecteur de ceux qui n’ont pas besoin de protection que la retraite est le seul patrimoine des gens qui n’ont pas de patrimoine.



Salubrité publique donc. Il faut chasser cette droite-là.

Et quand nous aurons tous dressé ce constat, l’essentiel restera à accomplir. Et l’essentiel est bien d’unir la gauche pour que l’espérance se lève à nouveau. J’avais dessiné devant vous hier les options stratégiques ouvertes aux radicaux pour contribuer à ces victoires électorales synonymes de renaissance. J’ai été très attentif à vos réflexions, à tous vos débats, et j’étais heureux, en vous entendant, de constater que nul n’envisageait que le radicalisme soit absent de ce combat où même qu’il y soit à la traîne de qui voudrait s’attribuer nos idées, accaparer nos valeurs, mobiliser nos électeurs sans traiter le Parti Radical de Gauche comme un véritable partenaire.

J’ai noté, sans en être étonné, que les opinions exprimées étaient à peu près partagées et donc que le débat restait ouvert.



Il m’a semblé qu’une majorité d’entre vous -majorité légère et respectueuse de l’opinion inverse ce dont je tiens à vous remercier et à vous féliciter- était plutôt favorable à une participation de notre parti à des primaires de la gauche de gouvernement destinées à désigner le meilleur candidat, celui ou celle derrière qui tous devront, le moment venu, être unis. Cette option est, je le répète, parfaitement respectable et tout à fait logique. Je vous rappelle toutefois qu’elle implique pour vous tous des efforts particuliers.

D’abord, vous devrez très rapidement faire avec le siège national le point de vos espérances et celui, nécessairement plus bas, de vos exigences pour les élections cantonales. Ce premier test sera très déterminant pour la suite puisque, d’une part, il sera situé avant le déclenchement du processus de primaire présidentielle et que, d’autre part, il sera un excellent révélateur de la bonne volonté de nos amis socialistes. Je ne me laisserai pas payer de mots ou de grandes déclarations d’affection. Comme vous tous, je crois à l’amour et à l’amitié mais j’y crois encore plus lorsque j’en reçois des preuves tangibles. Or, permettez-moi d’y insister, il ne nous sera pas possible à Paris d’établir ce lien d’évidence entre un équilibre aux élections cantonales et la dynamique de la primaire présidentielle si vous ne nous donnez pas les moyens de mettre les discours du PS à l’épreuve des faits.



Dites-nous, d’urgence, quelles sont les conditions locales de cette vérification. Mais vous ne devrez pas négliger la préparation des élections sénatoriales qui, je le répète mais vous l’avez compris, pourraient être capitales pour la gauche et pour les radicaux.



Ensuite, je l’ai dit, il nous faudra nous mettre d’accord entre nous puis avec nos alliés sur les modalités de notre participation à ces primaires. Je crois, pour ma part, que le calendrier de nos décisions est essentiel et je veux que les socialistes ne tiennent rien pour trop facilement acquis. Puisque nous allons évaluer les prémisses du partenariat lors du prochain scrutin, je vous propose de réunir à la fin du mois avril la Convention nationale des radicaux qui devra prendre les décisions suivantes :





  • oui ou non, participerons-nous à l’organisation des primaires ?


  • oui ou non, ces primaires doivent-elles, comme je le souhaite en ce qui me concerne, être ouvertes à tous les électeurs de gauche ou simplement républicains qui souscrivant un engagement écrit minimal sur l’alternance et sur les principaux axes d’un programme de gouvernement ?


  • oui ou non, les radicaux de gauche doivent-ils, comme je le pense aussi, avoir un candidat ou une candidate lors de ces primaires avec tous les risques de cette entreprise ? Ces risques sur lesquels il me faut insister sont principalement les deux suivants. D’abord le risque de la surenchère, naturelle dans une telle compétition qui rend difficile voire impossible la réconciliation qui devant suivre la confrontation comme on l’a vu après la primaire interne au parti socialiste en 2006. Ensuite et surtout, le risque pour les radicaux, par une insuffisante mobilisation de nos militants et de nos sympathisants, d’un résultat qui par lui-même affaiblirait nos revendications ultérieures pour les législatives.


  • enfin, en cas de réponse affirmative à la précédente question, qui d’entre nous aura à porter les couleurs radicales ? J’ai entendu celles et ceux qui pensent qu’il appartient au président d’endosser cette responsabilité. Je les remercie de leur confiance même si je devine, dans un ou deux cas isolés, qu’elle n’est pas dépourvue d’arrière-pensées. Puisque j’ai compris, en écoutant vos interventions hier matin, que je devais être Président du parti, candidat aux primaires, Président du Sénat et, pourquoi pas, Président de la République. Merci, c’est trop d’honneur mais je le dis tout net : si vous me confiez cette mission, je ne me déroberai pas. Mais je pense aussi que notre parti est riche de nombreux talents et je souhaite que tous ceux qui voudraient être désignés pour cette primaire m’adressent leur candidature avant la fin du mois de mars. Dans l’intervalle, je réunirai notre Comité Directeur aussi souvent qu’il faudra, pour l’informer et l’écouter.


Telle est donc la première voie. Je veux cependant vous rappeler que rien n’est acquis. J’ai d’abord le souvenir d’un congrès socialiste, celui de Liévin je crois, où nos amis se partageaient déjà les postes dans un gouvernement à nommer par Jacques Delors. Nous connaissons la suite. Surtout, je me méfie des déclarations faites la main sur le cœur, des pactes de non-agression d’autant plus éloquents que l’élection est lointaine et qui seront d’autant mieux déchirés qu’elle paraîtra certaine. Il serait ridiculement exagéré de dire que le PRG ne veut être ni Dantzig ni la Tchécoslovaquie mais je persiste à penser que le principal danger pour la gauche est dans son sein. Les germes de la division ne sont jamais définitivement morts. Nous avons dû les succès de 1981 et 1988 au fait que François Mitterrand avait établi sur la gauche un leadership quelquefois contesté mais au fond incontestable. Rien de tel aujourd’hui et je vous répète que je refuse de voir les radicaux faire les frais des querelles entre leurs alliés.

C’est pourquoi j’ai également écouté avec attention ceux qui estiment que, dans tous les cas, le PRG devra avoir un candidat. Je les remercie, eux aussi, de leur pondération et du respect manifesté aux tenants de l’opinion inverse. Pour être franc, je suis toujours ému lorsque s’exprime ce qu’on pourrait appeler une sorte de « patriotisme de parti ». Et depuis mes trop lointaines premières armes aux Jeunesses Radicales, j’ai presque toujours soutenu cette option-là. Elle est la plus simple, elle est la plus claire et la plus mobilisatrice. Je manquerais quand même à mes responsabilités si je ne mettais pas en garde les tenants de l’indépendance radicale contre les difficultés qu’une telle stratégie ne manquerait pas de rencontrer

D’abord, il nous faudrait expliquer à un électorat de gauche qui attend, qui exige l’union que nous allons nous entre-déchirer, y compris si, par improbable, les socialistes ne nous en avaient pas fourni le moindre prétexte.



  • Ensuite, nous aurions à choisir celui ou celle d’entre nous qui affronterait cette épreuve difficile et le combat qui suppose une totale mobilisation commencerait mécaniquement par des divisions internes.


  • Ultérieurement et même si ce n’est pas l’essentiel, il faudrait réunir les conditions politiques (spécialement les signatures d’élus) et matérielles pour participer à une campagne nationale très couteuse.


  • Enfin, nous avons l’expérience de cette élection. Entre le score de Michel Crépeau et celui de Christiane Taubira, nous avons la fourchette étroite et basse dans laquelle nous devrions ensuite situer nos espérances pour les législatives.


Rien n’est facile mais, je le répète, cette porte reste ouverte et je vous remercie de ne m’avoir, lors de vos différentes interventions, privé d’aucun des moyens de négociation qui vont m’être nécessaires dans les prochains mois. Vous m’avez fait confiance, je ne vous décevrai pas.

Mais vous savez bien que, dans toutes les hypothèses, votre avenir est d’abord entre vos mains.

J’entends dire, ici ou là que je viendrais trop souvent à la tribune de nos réunions pour admonester les radicaux en raison de l’insuffisance de leurs efforts. C’est vrai que j’ai eu à le faire. Je n’y trouve, soyez-en bien certains, aucune délectation. Je crois que, si le débat d’idées est légitime, la politique est aussi un rapport de forces et qu’il ne nous servira à rien de nous lamenter sur les mauvaises manières de nos partenaires si nous ne sommes capables que de solliciter leur mansuétude. Ils n’en manifesteront aucune pas plus que nous ne le ferions dans leur situation. On ne peut pas espérer exister en en demandant l’autorisation à d’autres.

C’est dire que les mois qui s’annoncent seront difficiles et vous demanderont beaucoup de courage.Je veux voir nos fédérations et nos militants mobilisés pour l’action et pas seulement pour la réflexion et les discussions  voire les divisions internes. Je veux voir les candidatures se multiplier aux élections cantonales et je vous assure que, si elles sont déposées dans un esprit de responsabilité, l’aide du parti ne sera pas mesurée à nos candidats.



Si nous décidons de participer aux primaires, je souhaite là aussi qu’à tous les échelons du Parti radical de Gauche, chacun ait à cœur non pas de figurer mais d’agir pour se faire respecter, ce qui à la fin, signifie toujours se faire compter pour peser.



Si vous choisissez au contraire d’avancer une candidature radicale à l’élection présidentielle, elle n’aura de sens que si notre candidat est adossé à un parti parfaitement uni, où nos parlementaires prendront le risque d’être en compétition avec leurs partenaires habituels, où tous les militants participeront à l’effort programmatique nécessaire pour nous faire identifier et à l’effort politique quotidien auquel nous serons astreints pour transformer une simple candidature en une grande aventure commune.



En résumé et comme toujours, j’en appelle à l’unité des radicaux. Je sens comme vous que la possibilité d’une nouvelle ère politique est enfin ouverte.



J’entends comme vous l’impatience du peuple qui gronde devant l’injustice et les inégalités.



J’espère comme vous que la gauche saura répondre à cette attente. Je sais comme vous que, bientôt, s’ils le veulent, les radicaux seront à nouveau en charge des espérances de notre pays.



Nos travaux ont été marqués par un mot que je veux reprendre comme un slogan : demain s’ouvre à nous, ayons CONFIANCE.



Confiance dans la France qui sait, dans les moments les plus difficiles, du moulin de Valmy au maquis du Vercors, aller chercher au fond d’elle-même les moyens de se dépasser et même quelquefois d’étonner le monde.



Confiance dans la gauche, cette gauche qui est si belle lorsqu’elle est unie, lorsqu’elle incarne l’espérance au point de porter le pays au-delà de ce dont il se croyait capable. Comment une gauche qui, hier, abolissait la peine de mort ne donnerait pas, demain, un merveilleux rendez-vous à la vie ?


Confiance dans le radicalisme aussi. Nos valeurs de tolérance, de laïcité, de solidarisme, de justice ne sont pas qu’un héritage. Elles sont encore, pour nous, un devoir, une exigence. Quand tout le monde, à la fin, aurait renoncé à changer la vie pour la rendre plus belle, plus généreuse, plus chaleureuse, les radicaux n’auraient pas le droit à un tel renoncement.



Car c’est la République qui vous regarde comme ses enfants préférés. Au diable les frayeurs, au diable les peurs, au diable les manœuvres, au diable les sondages, au diable les calculs ! Relevons la tête sous les yeux de Marianne, la très belle et soyons dignes de son affection !

1 commentaire:

Anonyme a dit…

En effet, on n'est pas à l'abri d'un 21 avril bis.Et connaît-on la date exacte des présidentielles de 2012 ?
B Tapie, je n'y crois pas.


Sylvia Mackert