jeudi 29 avril 2010

Pour une politique des temps sociaux



Les propositions du Parti radical de Gauche pour les retraites


PARIS, 29 avril 2010 (AFP) - Le Parti radical de Gauche (PRG) a rendu
publiques jeudi ses propositions pour une réforme des retraites, notamment passer à un système toujours de répartition, mais à points et instaurer une politique des temps sociaux reconnaissant pénibilité ou travail bénévole.
Lors de leur comité directeur national mercredi, les radicaux de gauche ont adopté à l'unanimité un rapport dans lequel ils estiment que l'approche actuelle du gouvernement, purement comptable et financière, est vouée à l'échec si elle ne s'élargit pas à une réflexion globale sur la société et ses évolutions".
La réforme doit d'abord comporter un volet consacré à la lutte contre le chômage, ciblée sur jeunes et seniors, et également s'appuyer sur un plan de relance industrielle.
Elle doit ensuite consolider le système par répartition en
proposant de nouvelles sources de financement pour tenir compte de l'évolution de la part salariale dans la valeur ajoutée (qui n'a cessé de diminuer depuis 20 ans)et du ratio actifs/inactifs".
Il faut accepter de taxer plus fortement les dividendes, de revenir sur certaines diminutions de charges sociales et sur certaines exemptions
fiscales, réfléchir à une taxation plus juste des patrimoines
, jugent-ils.
La réforme doit enfin stabiliser durablement l'âge de départ en retraite.
Certes allongée, l'espérance de vie en bonne santé reste à peine supérieure à 60 ans, note le parti présidé par l'ancien ministre Jean-Michel Baylet.
Pour eux, allonger les durées de cotisation exigées revient donc à allonger les périodes chômées si on ne tient pas compte des mutations de la société.
Les radicaux de gauche proposent ainsi une politique des temps sociaux qui reconnaissent le travail bénévole (5% du Produit intérieur brut), la pénibilité au travail et la prise en charge du 5e risque dépendance.
Il faut instaurer un système progressif et conséquent de bonus à la fois pour les jeunes qui effectuent des stages, des temps d'apprentissages et pour les personnes dépassant volontairement l'âge de la retraite.
Le PRG
propose également comme de nombreux mutualistes, de passer à un système toujours de répartition, mais à points, en rejetant les formules à la suédoise.

mardi 27 avril 2010

Les indifférents


Aujourd'hui, hommage aux italiens qui se battent, à ceux qui refusent de renoncer en diffusant le petit film joint qui illustre un texte d'Antonio Gramsci.


Bien sur, si le texte garde une actualité saisissante, il doit être re-situé dans son contexte historique... c'est aussi ce qui fait son intérêt. Il ne s'agit pas pour le café radical de tracer des paroles d'évangiles.






Antonio Gramsci est un penseur de la première moitié du vingtième siècle.


Il s'est engagé en politique avec toute son intelligence et sa fougue. Il a été socialiste, communiste et emprisonné pour ses idées par le régime fasciste. La plupart de ses écrits sont des écrits de prison.


Le texte est d'une grande beauté et fait indéniablement penser au pouvoir et à la communication politique... qui prend une dimension inquiétante si on la met en parallèle avec le pouvoir berlusconien ou sarkozyste... Je vous en livre ci-dessous la traduction ...


Les indifférents


Par Antonio Gramsci



Je hais les indifférents Je crois, comme Friedrich Hebbel, que « vivre veut dire être partisan », que les êtres humains séparés de la cité ne peuvent exister. Qui vit véritablement ne peut pas ne pas être citoyen ni prendre parti. L’indifférence est l’aboulie, le parasitisme et la lâcheté. Ce n’est pas la vie. Pour cela, je hais les indifférents.


L’indifférence est le poids mort de l’Histoire, c’est la balle de plomb pour le novateur, c’est la matière inerte où s’enlisent souvent les plus splendides enthousiasmes, ce sont les marais des fosses de la vieille cité, et qui la défend mieux que les murailles les plus solides, mieux que la poitrine de ses guerriers, par ce qu’elle engloutit les assaillants dans ses fonds limoneux, les décourage et leur fait parfois se désister de leur entreprise héroïque. L’indifférence œuvre puissamment dans l’Histoire Elle œuvre passivement, mais elle œuvre. Elle est la fatalité. Elle est celle sur qui l’on ne peut compter. Elle est ce qui désorganise les programmes, qui renverse les plans les mieux construits, elle est la matière brute qui se rebelle à l’intelligence et l’étrangle. Ce qui en découle, le mal qui s’abat sur tous, le possible bénéfice qu’un acte héroïque, de valeur universelle n’est pas tant dû à l’initiative d’un petit groupe qui agit qu’à l’indifférence, à l’absentéisme du nombre…


Ce qui advient n’advient pas tant par le petit nombre qui souhaite que cela advienne que parce que la masse des hommes abdique sa volonté, laisse faire, laisse se nouer les nœuds que seule une épée pourra par la suite défaire, laisse se promulguer les lois que seule la rébellion fera abroger, laisse arriver au pouvoir les hommes que seule une mutinerie pourra renverser. La fatalité qui semble dominer l’Histoire n’est rien d’autre au fond que l’apparence illusoire de cette indifférence, de cet absentéisme.


Des faits mûrissent dans l’ombre. Peu de mains, qui agissent sans aucun contrôle, tissent la toile de la vie collective, et la masse l’ignore parce qu’elle ne s’en préoccupe pas. Les destins d’une génération sont manipulés selon des visions restreintes, des buts immédiats, des ambitions et passions personnelles de petits groupes actifs, et la masse des hommes ignore parce qu’elle ne s’en préoccupe pas. Mais les faits qui ont mûri en viennent à éclore, et la toile tissée dans l’ombre est achevée… et alors il semble que ce soit la fatalité à abattre tout et tous, il semble que l’Histoire ne soit qu’un énorme phénomène naturel dans lequel nous restons tous victime, qui a voulu et qui n’a pas voulu, qui a su et qui n’a pas su, qui a agi et qui a été indifférent.


Et ce dernier s’irrite, il voudrait se soustraire aux conséquences, il voudrait que cela apparaisse clair, qu’il n’est pas responsable. Quelques-uns pleurnichent pieusement, d’autres blasphèment de manière obscène, mais personne ou peu se demandent : si j’avais fait moi aussi mon devoir, si j’avais cherché à faire valoir ma volonté, mon conseil, est-ce qui ce qui s’est passé ce serait passé ?


Mais personne ou peu se font une faute de leur indifférence, de leur scepticisme, de ne pas avoir donné leur bras ou leur temps aux groupes de citoyens qui, justement pour éviter le mal, se proposaient à combattre pour procurer le bien.


La plupart d’entre eux, au contraire, préfèrent parler de l’échec des idéaux, de programmes définitivement ruinés, et banalités semblables. Ils recommencent ainsi leur absence de toute responsabilité. Et ce n’est pas seulement qu’ils ne voient pas clair dans les choses, et que parfois ils ne sont pas à même de rechercher les belles solutions aux problèmes les plus urgents ou de celles qui, bien que requérant du temps et une ample préparation, sont toutefois autrement plus urgentes. Mais ces solutions restent bellement infécondes, mais cette contribution à la vie collective n’est animée d’aucune lueur morale ; il est produit de curiosité intellectuelle et pas du sens pénétrant d’une responsabilité historique qui nous veut tous impliqués dans la vie qui n’admet ni agnosticisme, ni indifférence d’aucune sorte.


Je hais les indifférents aussi parce que leurs pleurnicheries d’éternels innocents m’ennuient. Je demande des comptes à chacun d’entre eux sur le comment il a accompli le devoir que la vie lui a donné et lui donne quotidiennement, de ce qu’il a fait et de ce qu’il n’a pas fait. Et je sens pouvoir être inexorable, de ne devoir pas épuiser ma pitié, de ne pas avoir à partager mes larmes avec les leurs.


Je suis partisan, je vis, je sens dans les consciences viriles de mon être, battre l’activité de la cité future que mon être construit. Et en elle, la chaîne sociale ne repose pas sur un petit nombre, en elle, rien de ce qui se produit n’est dû au hasard, à la fatalité, mais est l’intelligente œuvre des citoyens.


Il n’y a en elle personne qui reste à la fenêtre à regarder pendant qu’un petit nombre se sacrifie, verse son sang dans le sacrifice ; et que celui qui reste à la fenêtre, aux aguets, veuille jouir du peu de bien que son peu d’activité procure, et épanche sa désillusion en vitupérant le sacrifié, celui qui s’est saigné, parce qu’il a échoué dans ses intentions. Je vis. Je suis partisan. Pour cela, je hais celui qui ne prend pas parti. Je hais les indifférents.


La cité future


Gramsci




jeudi 22 avril 2010

Contre la suppression des allocations familiales


Ci-dessous, le communiqué des Jeunes Radicaux de gauche, sur l'avant-dernière lubie de Sarkozy...




Les Jeunes Radicaux de Gauche (JRG) s'opposent à la position démagogique et idéologique annoncée par le Président Nicolas Sarkozy prônant la suppression des allocations familiales en cas d'absentéisme soit disant « injustifié ». Nous renouvelons ainsi notre opposition formulée à l'encontre des positions prises par le ministre Luc Chatel qui avait préparé le terrain dès le 1er avril, en affirmant vouloir rendre plus « efficient » le dispositif actuel effectivement peu usité.



Les JRG refusent ces mesures qui sont à la fois injustes et contre productives. Les causes de l'absentéisme scolaire sont multiples, parfois difficiles à percevoir. Il est dogmatique de mettre en relation directe et unique la responsabilité des parents dans cette situation. Ils rejettent également cette proposition en tant qu'inefficace, comme le démontre les études effectuées en Grande-Bretagne où un dispositif similaire est actuellement en vigueur.



Les JRG alertent également face au risque social qu'occasionnerait inéluctablement la suspension de ces allocations aux familles les plus exposées. Les collégiens et les lycéens visés subiraient inévitablement, au final, les conséquences de cette procédure.



Des mesures d'aide en faveur des parents en difficulté en facilitant (notamment) la médiation entre le personnel enseignant et les familles, le renforcement des moyens mis à disposition des lieux de scolarisation situés en zones difficiles ou encore la mise en place d'un véritable service public de l'orientation permettraient de relancer réellement un système où la méritocratie est en panne.

Paris, le 21 avril 2010

jeudi 15 avril 2010

Une interview d'Hervé Causse

Le café radical reproduit in extenso l'interview très intéressante d'Hervé Clausse, radical de gauche, réalisé par le journaliste Philippe Le Claire pour le compte du quotidien régional "L'Union"
Après avoir exercé à l'université de Reims Champagne-Ardenne, Hervé Causse est professeur de droit privé et de droit des affaires de la faculté de droit de Clermont-Ferrand. Christian-Philippe PARIS


En attendant la prochaine crise financière

Le système bancaire international s'est remis à fonctionner sur les mêmes bases irrationnelles.
Foin de «régulation» ou de «moralisation», les États sont dépassés et les petites gens paient les pots cassés.
Interview décapante d'un prof de droit qui ne parle pas la langue de bois...

Les 16 et 17 mars derniers, le Centre de droit international de l'université de Paris Ouest organisait à l'OCDE un colloque international, intitulé « La refondation du système monétaire et financier international Evolutions réglementaires et institutionnelles ». Au nombre des trente-six intervenants, diplomates, fonctionnaires des organisations et institutions internationales, experts, universitaires économistes et juristes - internationaux eux aussi, un Rémois, bien connu des juristes champardennais : Hervé Causse, professeur de droit privé et de droit des affaires de la faculté de droit de Clermont-Ferrand, précédemment maître de conférences et créateur de l'Institut de recherche sur les contrats et investissements lourds (Ircil), à l'université de Reims de 1992 à 2003 (par ailleurs, Hervé Causse a participé, par le passé, à la vie politique rémoise, sous l'étiquette PRG).
La finalité revendiquée par les organisateurs de la conférence : « contribuer aux réflexions relatives aux réformes majeures de nature monétaire, financière et institutionnelle envisagées pour renforcer - ou reconstruire ? - le système monétaire et financier international… » Pas vraiment le genre de discussion que l'on tient au café du commerce… Hervé Causse est intervenu sur un thème particulièrement d'actualité : « Réguler les excès de la finance ». Il nous explique les tenants et aboutissants de sa problématique, qui rejoignent fatalement, notre petit porte-monnaie.


Les Français s'intéressent à la crise financière parce qu'ils pensent payer les milliards que les banques ont joués sur tapis vert. Est-ce le cas ?
« Oui, les Français ont déjà commencé à payer ; l'Etat s'est endetté et donc nous paierons. Nous paierons également par des services bancaires plus chers, ou plus nombreux, mais aussi via une poussée d'inflation qui dévalorisera les milliards de liquidités en circulation, notamment les milliards que les banques centrales ont prêtés en urgence aux banques pour les refinancer, les sauver. »


Le Français moyen est donc tout seul à payer les pots cassés ?
« Dans une crise moyenne comme en France, j'ai le sentiment que oui, mais pas aux Etats-Unis ou en Angleterre. Là-bas, la crise, plus sévère, a vu des banques faire faillite. Les actionnaires qui finançaient ces banques d'investissement ont perdu leurs actions, les dirigeants, leur position… Mais il est vrai qu'ils ont sous eux un matelas de dizaines de millions de dollars. En outre, l'actionnaire de banque est parfois l'Américain moyen… »
Mais nos banques n'ont pas fait faillite et, justement, on les a aidées pour qu'elles ne fassent pas faillite. Est-ce normal ?
« Aider avec de l'argent public une entreprise privée, ce n'est pas la règle dans une économie de marché. Mais tous les dirigeants du monde ont agi ainsi. Par crainte d'une crise radicale du système financier, une crise systémique : une série de faillites bancaires qui aurait bloqué l'économie. Une intervention à ce niveau n'était pas prévue au programme ou inscrite dans les Codes ! Les dirigeants veulent des réformes, de nouvelles règles, mais à quoi serviront-elles si une fois votées et appliquées on les suspend ? C'est le point central de mes études. Sachant que la régulation de début 2007 était la meilleure du monde ! Et qu'après août 2007, les mêmes dirigeants l'ont tous considérée comme mauvaise et à changer ! On risque de récidiver… »


Vous avez l'air de penser que nous sommes dans une impasse et que les citoyens devront toujours payer les erreurs des banquiers ou les mauvaises lois, françaises ou européenne, voulues par les dirigeants…

« Effectivement, je ne suis pas loin de le penser, notamment parce que tout le monde manie des idées économiques, comme si les idées étaient des règles juridiques applicables et efficaces. Mais tel n'est pas le cas. Ni les économistes ni les hommes politiques ne sont véritablement maîtres de la technique des règles, je tente de ramener l'art juridique au cœur du débat. Pour réguler, c'est-à-dire dans le sens commun pour « maîtriser » les choses, il faut adopter des règles précises et des principes plus généraux pertinents. Elaborer une bonne règle, limiter les pratiques bancaires, cela requiert un art juridique qu'aucun discutant, à quelque niveau que ce soit, ne me semble réellement posséder. »


La crise semble surmontée quand bien même il nous en a coûté…
« À certains égards, il faut reconnaître que la crise a été jugulée. Mais ce qui a marché une fois marchera-t-il une seconde fois ? Comme le Prix Nobel Joseph Stiglitz, je considère que l'ancien système a recommencé à fonctionner. Pourquoi en serait-il autrement ? Pendant que les dirigeants de la planète discutent et envisagent des lois, les financiers prêtent avec les contrats d'hier, transfèrent des risques avec les contrats d'hier, créent des entités dans des zones à basse pression fiscale pour y amasser des milliards d'euros, achètent des actions (donc des entreprises) où ils le veulent dans le monde… Le pouvoir politique est presque insignifiant par rapport à l'efficacité du monde de la banque et des affaires ! Le système d'hier est reparti et les peuples sont en danger, même si le pire n'est pas certain, car la méfiance est aujourd'hui la consigne. »


Comment se fait-il que la capacité de réaction des autorités soit aussi faible ?

« Il y a souvent un problème préliminaire de compétence et d'honnêteté des dirigeants politiques, mais au fond, il y a deux facteurs : d'abord, des règles d'échanges qui facilitent, voire imposent la mondialisation de l'économie, alors qu'il n'existe aucune institution publique économique ni monétaire mondiale qui puisse imposer des règles ; ensuite, la mondialisation qui a surpris - je crois - parce qu'elle a été propulsée par l'avancée des sciences et les merveilles de l'électronique. Lorsque j'ai 100 milllions d'euros sur mon compte, il me suffit de cinq clics pour qu'ils se retrouvent en Chine ou à Antigua : qui va m'interdire de le faire ? Qui va m'interdire d'acheter des titres ici ou là ? Qui veut vivre en Corée du Nord ? »


Si on vous comprend bien, la liberté serait la mère des vices financiers ?

« La liberté, dans le monde des affaires, c'est notamment la liberté de contracter, de passer les contrats que l'on veut. Et c'est de la liberté pure : que seraient les libertés publiques si nous n'avions pas le doit de conclure des contrats ? Pas grand-chose. Pour réguler la finance, il faut maîtriser cette liberté sur une vingtaine de contrats. Après deux ans de tâtonnements, Christine Lagarde et Barroso admettent enfin qu'il fallait limiter les CDS (Ndlr : credit default swap, un type de contrat*), on est enfin au cœur du sujet. Mais leur ambition vise seulement les titres émis par les Etats, c'est un quart du problème. En outre, le temps que ce soit fait, je pense que de bons juristes bancaires auront créé de nouveaux contrats, singulièrement si les règles édictées n'allient pas des principes et des prescriptions précises. Pour faire de bonnes lois, le « volontarisme » ou des idées économiques ne suffisent pas… Il faut encore de l'art juridique. Les peuples risquent de l'apprendre à leurs dépens. »

* Un CDS (credit default swap) est un contrat d'assurance par lequel un établissement financier se protège du risque de défaut de paiement d'un crédit en payant une prime. Ces dérivés de crédit ont connu un large développement de la part des intermédiaires financiers qui les utilisent de façon spéculative et en font les supports d'une titrisation vertigineuse.

Propos recueillis par Philippe Le Claire


vendredi 9 avril 2010

Socialistes, encore un effort pour être crédible...

Plus d'une centaine de personnes ont assisté à la réunion organisée par Michel Champredon autour de Guillaume Bachelay et Nicolas Mayer-Rossignol , auteur de l'ouvrage "la gauche après la crise".


Je serais tenté de reprendre la formule qui a fait la gloire du Charlie hebdo de la belle époque : "je l'ai pas vu, je l'ai pas lu, mais j'en ai entendu causer ...". Avec comme excuse suprême que j'en ai entendu causer par les auteurs eux-mêmes... et comme autre précaution oratoire celle-ci : il ne s'agit absolument pas pour moi de dégoûter qui que ce soit d'acheter l'ouvrage.


De même, de cette soirée, je voudrais commencer par retenir quelques aspects positifs essentiels.


Le premier, vous l'aurez deviné : le monde. Les photos reprises sur le face book d'Anne Mansouret (je la remercie d'autant plus de les utiliser sans vergogne que je ne lui ai pas demandé l'autorisation) ne donne qu'une faible idée du monde présent. Cela confirme dans la lignée des cafés radicaux, qu'il y a une véritable attente à gauche de débats... Sans doute aussi peut-on estimer que le débat est d'autant plus vif autour du parti socialiste, que celui-ci a montré lors des régionales sa puissance en terme pôle d'attraction et que la perspective d'enjeu politique nationaux lui donnent de nouvelles responsabilités.


Le deuxième point : la remarque préliminaire de Guillaume Bachelay : on parle beaucoup de volatilité de l'électorat, mais qu'on en s'y trompe pas, il y a une grande cohérence. Guillaume Bachelay a illustré géographiquement cette cohérence en situant à l'est d'une ligne Le Havre Montpellier les phénomènes inquiétants de l'élection tels que le très fort absentéisme et la montée ou plutôt le maintien d'un front national fort.

Sur ce deuxième point, je voudrais faire part de mon accord total et que la géographie a elle seule ne suffit pas à illustrer, mais nous y reviendrons.

C'est bien la France qui a dit non à l'Europe en 2005, qui a voté majoritairement Sarkozy deux ans plus tard, et qui le rejette à présent...

C'est aussi la même France qui a mis le parti socialiste dans les choux aux européennes, le plaçant à plusieurs reprises derrière les écologistes .. avant de le placer quelques mois plus tard en force structurante de la gauche.

Je schématise les comportements comme suit, et tels que je les ai vécu.

Le vote anti-européen a été un vote de crainte, de rejet d'un monde ouvert et dangereux. C'est cette angoisse que le vote Sarkozy a confirmé. Là encore un vote appelant à la certitude, un vote sur les valeurs passées, travailler plus pour gagner plus. Un vote d'appel à une reconnaissance, qui a été celui des petites villes contre celui des grandes villes, un vote des personnes installées craignant de perdre ou de perdre encore plus, un vote permettant de croire que l'on pouvait gagner encore.... C'est à cette angoisse là que la gauche est incapable de répondre depuis des années.... Et c'est cette angoisse là qui est ravivée par le pouvoir de Nicolas Sarkozy... Et c'est ce qui explique aussi la très forte déception à l'égard de Nicolas Sarkozy. Tous les excès sarkozystes sont des erreurs fondamentales parce qu'au lieu de répondre aux attentes populaires, il ne répond qu'à ses propres attentes alors qu'elles sont de moins en moins confondues. A noter que parmi les retours de la campagne électorale des députés de droite figuraient parmi les premiers reproches la nuit au Fouquet's qui n'était toujours pas digérée...

Autre point à analyser : le vote écologiste aux européennes qui a nettement baissé lors des régionales. Pourquoi ? A mon avis parce que le vote écologiste signifiait d'une part une défiance vis à vis des socialistes qui, il est vrai avaient fait très fort pour détériorer leur image (tricherie pour éliminer Ségolène Royal, déchirement au congrès de Reims ... et absence de ligne programmatique) et bien sûr défiance vis à vis du pouvoir en place. Les régionales ont permis de rationaliser ce vote. On a voté socialiste parce que c'était l'efficacité d'une institution anti-sarkozyste qui était plébiscitée .... Mais attention, tel ne sera pas le cas à la prochaine présidentielle.

Les pièges à éviter sont nombreux. Au premier rang de ceux-ci figure la tentation hégémonique. Le vote écologique est bien plus faible aux régionales qu'aux européennes, j'ai expliqué pourquoi. Mais il est bien présent. On peut noter d'ailleurs que là où les écologistes se sont maintenus, ils ont fait en général et au moins en Bretagne et en Rhône Alpes un score supérieur à celui du premier tour. Cela amène forcément à penser aux présidentielles.

On l'a un peu vite oublié, mais le danger alternatif pour le vote socialiste à la présidentielle, c'était Bayrou. A présent, c'est le vote écologiste. Si la gauche n'arrive pas par des primaires cohérentes à amener à une démarche programmatique rassurante et forte, si elle papillonne façon Royal 2007, il y aura forcément un vote alternatif fort qui la privera de victoire. L'erreur socialiste encore une fois serait de se conforter dans sa seule logique interne et de mépriser les autres courants porteur des angoisses et des attentes de la société... Et si le parti socialiste se remet dans une logique à l'ancienne portée par la vague rose des régionales et voulant rejouer le PS de 1981 avec rôle de l'Etat et tout le toutim il a perdu d'avance ... et si par miracle, il gagnait c'est à dire si la droite, ce qui n'est pas exclus lui faisait cadeau du pouvoir, ce serait la population dans son ensemble qui se débarrasserait durablement de la gauche... et bien avant les échéances prévues... L'un des moyens d'éviter ça, c'est bien sur les primaires à gauche ... un bon moyen de poser le débat.

Voilà pourquoi j'ai été personnellement très déçu de l'exposé de MM Bachelay et Mayer-Rossignal. Ils sont jeunes, c'est vrai... mais c'est pas parce qu'on est jeune qu'on doit répéter les mêmes c... imbecillités que celles que j'ai pu moi même dire il y a 30 ans. Un monde nouveau se réinvente devant nous. Il est porteur de danger... Mais ce n'est pas avec les vieilles recettes qu'on y fera face... Soyons à la hauteur de la cohérence du corps électoral.

lundi 5 avril 2010

Syndiquer les gendarmes ?

Une seule force de l’ordre sur le territoire national, ça peut se défendre …
C’est une position que j’avais défendu lors de débats à l’intérieur du prg. Mes arguments n’étaient pas tout à fait les mêmes que ceux de notre président de la République.
Il n’y a pas de raison objective pour que le maintien de l’ordre et de la tranquillité publics sur le territoire ne dépendent pas du ministère de l’intérieur. Pourquoi envenimer la guerre des polices, en rajouter encore en faisant dépendre de deux hiérarchies différentes le maintien de la sécurité publique selon qu’elle s’exerce en territoire urbain ou rural ?

Le ridicule du pouvoir
Or, voilà que de cette question intéressante, le pouvoir central ne met en avant que des mouvements de menton parfaitement ridicules…
Ainsi, alors même que l’on envisage de faire évoluer le statut des gendarmes, c’est au nom de ce propre statut, que l’on sanctionne le plus durement possible Jean-Hugues Matelly (photo), chercheur au CNRS et chef d’escadron, pour avoir dit ce qu’il pense.
Le voilà donc suspendu, dans l’attente d’un jugement du conseil d’État. On espère que ledit conseil d’État relèvera l’incohérence qui consiste à autoriser un militaire lié au devoir de réserve et à la soumission à la hiérarchie à être en même temps chercheur au CNRS et à avoir alors un devoir de liberté.
L’affaire ne s’arrête pas là… et à mon avis ne s’arrêtera pas là. L’ADEFPROMIL ( Association de défense des professionnels militaires) a commis un poème clin d’œil sur le sujet, et une enquête a été diligentée par la hiérarchie qui dit avoir confondu l’auteur des vers de mirliton[1].

Mon point de vue radical : les gendarmes et les militaires doivent pouvoir se syndiquer

Pour les radicaux, tout ce qui porte atteinte à la liberté est suspect, comme tout ce qui porte atteinte à la réflexion. Ainsi défendre l’unification des forces de sécurité ne doit pas avoir pour conséquence la défense d’un ordre militaire suranné et dépassé.
Le problème de la syndicalisation de la gendarmerie se pose très clairement depuis la révolte des gendarmes de 2001. Il pose par ricochet le problème de la syndicalisation de l’armée, tout simplement parce qu’une société ouverte, comme la notre ne peut rester dans des schémas d’organisation coupés de la réalité sociale, se claquemurant dans des ghettos d’où sortent traditionnellement les émanations les plus nauséeuses.
La modernisation de la sécurité publique ne passe pas seulement par l’unification du système de commandement, mais surtout par sa réforme. La France a besoin d’une force publique moderne, ouverte, représentative de la société française, et capable de réfléchir sur elle-même et sur la société. Les gendarmes intégrés ou pas dans la police, doivent pouvoir se syndiquer au même titre que les policiers. Tel est l'une des conditions de la modernisation de la sécurité publique.

Il ne semble pas que ce chemin audacieux indispensable soit celui du Président de la République.

[1] IL PLEUT SOUS NOS KÉPIS !
Il faisait beau alors, le jour où j’ai signé !
Je me souviens comme j’étais fier de m’engager,
D’être formé à ce métier par mes aînés…
Du bon droit je voulais être le soldat,
Dans le respect des traditions et des hommes.
Du citoyen, à tout faire je serai l’homme !
De ma personne alors, j’ai donné sans compter.
Ma famille dans cette voie s’est trouvée liée.
Mes devoirs étaient les siens sans qu’elle ait signé…
Nos Gradés, nos Officiers étaient nos modèles.
Ils savaient nous motiver et nous ordonner.
Alors nous étions soudés, unis et fidèles…
Nous savions des sacrifices la juste raison,
Et étions tous reconnus “Servants de la Nation !”
De la France, la plus noble et vieille Institution.
Un nouveau Roy fût nommé, et tout a changé.
Diviser pour mieux régner, tel était son but !
Il y parvint bien, précipitant la chute !
Pour ce faire, il choisit bien parmi les nôtres,
Ceux d’entre eux les plus vénaux, les moins fidèles,
Leur fit tant miroiter, qu’ils furent ses “apôtres”.
Ces vendus et parjures aujourd’hui, ont ourdi
D’enterrer sans coup férir notre belle histoire…
De nous taire ils nous ordonnent, arguant : “Tout est dit !”
L’un des nôtres osa parler sans démériter,
Se faisant ainsi le râle de notre douleur…
Il fût vite éliminé par ces fossoyeurs !
Aujourd’hui, Sainte Geneviève saigne et pleure,
Je sens bien ses larmes chaudes sous mon képi,
Comme si sur moi SARKOZY faisait son pipi…
Soldats nous sommes, et c’est debout que nous mourrons.
Et à l’instar de CAMBRONNE, “MERDE” nous dirons.
Nous briserons nos armes, mais nous taire “Pas question !”
Nous ne sommes que des hommes, soldats mais citoyens,
Et nos voix dans l’urne pèsent bien pour un scrutin…
Qu’on les entende ensuite, d’étonnant n’a rien.
Nous taire il ne faut point, surtout si c’est la fin !
Au pays des Droits de l’Homme, on dénie les miens.
Fidèle, loyal je suis, muet je ne suis point.
Même si tout est fini, que prévue est la fin,
Nous n’irons au sépulcre qu’après avoir tout dit.
Geneviève, Chère Patronne, Il pleut sous nos képis !
Adjudant A.
Dédié au Chef d’Escadron Jean-Hugues MATELLY